Tout dans un regard
Je ne vais pas m'improviser spécialiste du cinéma muet, ni du cinéma chinois d'avant guerre, encore moins de Ruan Lingyu. Juste en témoin curieux et conquis d'un film d'une autre époque, d'un cinéma chinois bien loin des Jackie Channeries ou des John Wooseries. Etant un grand fan des films peu bavards, j'avoue prendre un énorme plaisir devant un film muet tel que celui-ci. La simplicité des moyens mis en oeuvre à l'époque, comparé aux supers productions actuels, l'académisme de la réalisation, l'absence de dialogue justement, tout ceci concourt à remettre l'acteur au centre du film.
La Divine repose entièrement sur les épaules de Ruan Lingyu, qui rappellera aux fans de cinéma chinois Renée Liu et Carina Lau. Mais outre sa beauté étonnement moderne pour l'époque, ce qui frappe le plus reste sa capacité à exprimer ses émotions avec son seul visage, et surtout à les enchaîner. Et aucun artifice ici évidemment, des plans longs, des cadrages rapprochés sur les acteurs.
L'histoire du film n'a rien d'exceptionnel, mais là aussi la simplicité fait le succès du film, et on se surprend à voir une approche humaniste pronant les droits de l'homme dans un pays depuis décrié par beaucoup pour ces mêmes raisons. Il est permis de croire que monter ce même film à notre époque serait sûrement impossible. Il faut aussi noter quelques idées formelles intéressantes, même si la réalisation est évidemmentr très sobre, époque oblige. On remarque ainsi un petit plan en vue subjective, ainsi que quelques cadrages très à propos soulignant simplement le propos.
Au final, ce drame social vaut principalement pour l'interprétation très intense de son actrice principale, passée depuis à la légende. Et aussi pour sa rareté, les films chinois de cette époque ayant pour la plupart tout simplement disparu.
